mardi 24 janvier 2017

Une seconde d'éternité

Chopin,  nocturne op. 9,  no 2

En dansant avec toi, je nous ai imaginés à Naples,
mangeant au soleil des spaghettis et buvant du vin rouge un peu âcre.

En t'embrassant, je nous ai vus au Cap d'Erquy,
les pantalons retroussés, les pieds dans l'eau froide, le nez au vent.

En te déshabillant, je nous ai rêvés à Vienne,
robe du soir et queue de pie à l'opéra, emportés, par Mozart bien sûr.

En m'endormant dans tes bras...

Au réveil, j'ai réalisé que les contraintes de la vie ne nous laisseraient même pas le temps d'aller faire les courses à la Migros ensemble - de toute façon, tu vas à la Coop.


J'étais arrivée avec mes gros sabots, parlant trop, gauche et mal coiffée.
Je suis revenue avec mes talons, séductrice et séduite.

Il y a eu des éclats de rire et des confidences, le temps d'un week-end, le temps d'une parenthèse.
Rappelle-toi ton professeur, une parenthèse, comme une porte, se referme, toujours, doucement.

Pour garder au fond de soi l'écho de cette légèreté, la résonnance de cette fugace ivresse.
Pour conserver le souvenir d'un instant précieux, comme un trésor trop rare.

Je repars sur la pointe des pieds, mes chaussures à la main, pour ne pas faire craquer la lame du parquet, pour ne pas te réveiller : le bruit du loquet me fait sursauter. 
Je repars, la robe froissée, mon maquillage a coulé, je suis blême.  

Le jour n'est pas encore levé et ce soir, je serai de retour dans ma solitude. 


4 commentaires:

  1. Quand la douce complexité se transforme en complexe complication...la solitude entraînée par chaque seconde me paraît aussi une éternité.

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  2. La complexité est douce amère, toujours... Des grandes souffrances émergent les plus grands apprentissages, je suppose...

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  3. Excellent choix, dans le chapeau du nocturne de Chopin. Il me semble en entendre les dernières mesures mi-sol, mi-sol … en lisant la dernière phrase

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  4. Chopin "dit" en effet mieux avec ses notes que moi avec mes mots. J'ose penser qu'ils se complètent.

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