Avoir un premier enfant, cela m'a fait devoir vivre la pénible expérience de troquer une Land Rover, trop chère pour un budget devenu familial, contre une Fiat Multipla : je suis donc la preuve vivante qu'on survit à la honte de se promener dans un truc vraiment moche mais réellement pratique.
Avoir un deuxième enfant, cela m'a fait renoncer respectivement à mon abonnement au fitness de luxe (j'ai maintenant une excellente excuse pour avoir les abdominaux mous), à ma revue d'art sur papier glacé (ça, j'ai un peu plus de peine à m'en passer parce qu'il est plus difficile de cacher un manque de culture qu'un fessier un peu flasque vu la mode aux jupes amples), à ce cordial "bonjour" de la vendeuse de la boutique "classe", qui accueille une cliente habituée (bon, comme de toute façon, j'ai l'air mal habillée même dans des frusques très chères, c'est pas réellement un drame pour moi de devoir faire les soldes dans les supermarchés).
J'ai renoncé, les week-ends et jours fériés, aux grasses matinées qui, dans mon cas, n'étaient pas un vain mot puisqu'elles duraient généralement jusqu'à 11 heures, le brunch se terminant par une délicieuse sieste crapuleuse.... J'ai renoncé aux sorties spontanées, genre "tiens, il fait beau, on va manger sur une terrasse ?", la main s'arrêtant dans sa course vers le frigo, avec la variante "écoute, là, ça fait un moment qu'on bosse comme des fous, on part en week-end en Alsace ? Je trouve que ça serait une bonne idée si on prenait congé demain après-midi, comme ça, ça nous ferait un long week-end".
J'ai renoncé à un tas de choses, pour finalement en gagner tout plein d'autres (pêle-mêle je citerai notamment
- le constat que la terre ne s'ouvre pas sous mes pieds lorsque Junior pique une crise de rage en plein milieu d'un supermarché bondé,
- le plaisir inégalé de passer deux heures aux urgences pédiatriques parce que Mini fait une crise de faux-croupe à quatre heures du matin, ou encore
- la tentation de programmer le réveil une heure avant le début d'une journée "habituelle" avec les enfants pour passer un moment "câlin" avec Mister....).
Je me suis accomodée de beaucoup de choses, notamment grâce à l'humour de Mister...
Mais depuis que j'ai des enfants, j'ai constaté qu'il y a une chose qui me pèse, j'ai découvert the chose qui a le don de m'agacer au plus haut point, pour ainsi dire tous les jours : à savoir ne plus pouvoir "vivre spontanément" et toujours devoir "anticiper".
Anticiper parce que là, ça va être Pâques et que durant cette période, les magasins seront fermés quelques jours et que, partant, je serais bien avisée d'acheter encore un paquet de couches, d'autant que, on parie, la semaine prochaine, la crèche va m'en demander un nouveau stock. Je peux bien sûr vivre "dangereusement" mais la simple vision d'une Madame Poppins errant, hagarde, d'une sation service à l'autre pour trouver la bonne taille de couches un dimanche soir provoque une attaque de panique. Chez moi, pas chez Mini qui trouverait certainement que faire pipi et plus si entente dans son pyjama est très amusant...
Anticiper parce que là, Mini va bientôt avoir deux ans et que si je veux pouvoir voir le pédiatre pour son contrôle des 24 mois le mercredi après-midi, pas à 13h00 parce qu'il est alors super méga grognon (pas le pédiatre, Mini), pas à 17h45 parce que voir ci-avant, je ferais bien d'appeler demain, pour prendre d'ores et déjà rendez-vous, sous peine de voir "mon" créneau horaire déjà pris si j'appelle une semaine avant le deuxième anniversaire de mon cadet.
Anticiper parce que là, franchement, c'est une aubaine, ces vestes d'hiver soldées mais diable, quelle taille fera Junior l'hiver prochain, à 5 ans ? Encore que là, le dilemne n'est pas tant dans la taille (à son âge, on grandit moins vite) mais dans la question qui ne trouvera réponse que dans douze mois "est-ce que le super motif pirate et têtes de mort au dos lui plairont encore ?".
Anticiper parce qu'au mois de juillet, le cousin de Mister et sa femme (celle du cousin, hein, pas celle de Mister, c'est moi la femme de Mister) fêtent leur dix ans de mariage, fête "sans enfants". Donc, faut que je trouve une baby-sitter pour le week-end du 31 juillet au 1er août. Eh zut, voilà pas que belle-maman est aussi invitée à la fête et que GM2 (grand-mère 2) est en vacances à cette date... tant pis, on verra la semaine prochaine avec la marraine de Mini.... allez, vite, faut que je note dans mon agenda, sinon, je vais oublier de lui demander.
Anticiper parce que après-demain, ma séance avec mon directeur va se terminer tellement tard que je n'aurai plus le temps de faire des courses et que si je ne veux pas avoir un mari de mauvaise humeur parce que nous mangeons pour la troisième fois de suite des pâtes à l'huile d'olive - parmesan, je serais bien inspirée de penser à du jambon au madère pour jeudi soir quand je ferai les courses aujourd'hui...
D'ailleurs, à force d'anticiper, chaque sortie avec les enfants ressemble à un véritable déménagement : comme il fait froid mais que les enfants voudront quand même aller dans le jardin, chez ma copine, je vais prendre les écharpes et les gants. Et comme le jardin est trempé, je vais prendre des pantalons de rechange. Et comme on va rentrer tard, je vais prendre aussi les doudous de chacun, sans oublier les pyjamas au cas où on resterait pour souper chez la copine, pour que les enfants puissent aller dormir.... Ah oui, le sirop contre la toux pour Mini, le DVD fétiche de Junior parce que ceux que possèdent les enfants de la copine, bien plus grands, sont trop violents.... Les couches, les lingettes.... Et encore, là, j'ai plus besoin de citer la banane (pour la compote) et la petite cuillère pour Mini, qui accepte (enfin) de prendre un goûter de "grand"....
En d'autres termes, je suis tout le temps en train d'anticiper et je me demande si parfois, à force de faire tourner mon cerveau toujours vers "demain" et "au cas où", je ne serais pas en train de passer à côté de certaines choses, de ne plus vivre pleinement l'instant présent.
Mais bon, la question va rester ouverte parce que là, faut que je file : ben ouais, j'anticipe un peu sur le prochain billet puisque le parrain de Junior vient pour l'apéro, demain soir. Je n'aurai donc pas le temps de l'écrire à l'heure "usuelle"... Dois-je en conclure qu'un blog, c'est encore une raison de passer à côté du moment présent ?
Excellent, j'adore:-)
RépondreSupprimerLe truc, c'est d'être un mec.
En fait, on fait plein de choses, nous, les mecs: on bosse (aussi), on fait aussi les courses, même qu'on fait à bouffer.
Bon, le repassage, Ok… on n'est pas tété, quoique j'en connais qui ne s'en sortent pas trop mal.
Mais pour anticiper la garde des petits, ça, c'est top, on est tellement mauvais, que jamais plus on nous demande.
Donc voilà, c'était juste un petit truc si jamais ça peut t'aider Mme Poppins.
Si ça peut t'aider…
C'est à peu près ce que j'allais te dire, Madame Poppins.
RépondreSupprimerSauf que si la chirurgie pour le changement de sexe ne te tente pas trop, que penses-tu d'un partage des taches d'anticipations ?
Quoi ? Mister oublierait d'appeler la marraine ? Et bien il fera comment pour le fameux weekend-sans ?
Quoi ? Mister aurait oublié le bonnet et l'écharpe ? C'est donc à lui de gerer la crise du grand ou petit (ou même les deux, allez, soyons diaboliques...). Cela aidera sans doute à ce qu'il ne les oublie pas la prochaine fois...
Le tout étant bien sûr au départ, lors de la période d'apprentissage, de bien choisir les tâches à partager... faudrait quand même pas que l'averse te tombe dessus à chaque fois....
Ou alors... habituer tes enfants à ce que tout ne soit pas toujours parfait (d'ailleurs en partageant les taches d'anticipations, c'est ce qui se passera souvent...). La frustration, je suis sure fait aussi partie de leur vie... ;-))
Amitiés,
Soph
PS: Après 4 ans de judicieux conseils, de raisonnements pour le moins interessants, voilà que le "mythe MP" s'effondre en 3 secondes !!! Nooooooon, pas la Multipla !!!....... ;-)))
mon monde s'effondre après 4 années, comme celui de Soph : vous imaginer avec votre parapluie et vos merveilleuses bottines, au volant d'une multipla, quel drame !
RépondreSupprimerQuant à cette recherche de perfection et d'anticipation, si elle ne m'étonne guère, elle me fait sourire : où est cette femme qui prône le bien-être personnel pour élever des enfants heureux ?
Comment être sereine si on s'encombre l'esprit d'autant de détails ?
J'avoue être plutôt laxiste : j'ai ainsi dans mon réfrigérateur 2 vaccins en détresse, attendant le rapper depuis près d'un an. S'il n'y a pas de pyjama, qu'importe, il dormira aussi bien en slip et tee-shirt avec une couverture, si on a oublié le repas, on s'arrêtera à la supérette du coin, ou ma copine aura bien une tranche de jambon. S'il n'y a pas de jouet, il y aura bien une feuille de papier et un stylo...
Peut-être pourrait-on travailler à un juste milieu ?
Bonjour, de lien en lien me voici ici et j'aime bien ce que je lis! je n'en ai qu'une de 18 mois mais déjà j'anticipe sur le lycée! c'est grave docteur? par contre, pour ce qui est d'anticiper le repas du soir, suis plutôt assez nulle et j'ai totalement arrêté d'anticiper les achats d'habits depuis que j'ai donné une garde robe d'été jamais portée vu le magnifique temps de l'été dernier!
RépondreSupprimerje ne vois pas du tout à quoi ressemble la Multipla mais je vais faire attention!
carole
http://nipette.over-blog.com
Carole, viens ici que je t'embrasse : le lycée, ça, j'aurais pas osé ;-)
RépondreSupprimerDites, les "autres", savez-vous que je suis totalement effondrée ?
Bon, non, la Multipla, ça, je comprends, c'est dur, à dire mais surtout à vivre ! Je ne peux donc que vous dire que je partage votre douleur !
En revanche, je suis effondrée parce que de mon billet, il a été automatiquement déduit que ma manie anticipatoire, elle est causée notamment par une défaillance de Mister.
Où, grand dieu, avez-vous lu que Mister n'anticipait pas ? Il le fait à merveille tous les vendredis (travaillant à 80%, il est avec les enfants ce jour-là) mais lui demander de me donner un coup de main pour anticiper les mercredis, quand il est en pleine séance avec ses collègues, ça serait lui demander d'avoir le don d'ubiguité... S'il a beaucoup de qualité, il ne possède pas celle-ci.
Ensuite, pourquoi faire cet amalgame "anticiper = viser la perfection" ? On pourrait aussi dire que ne pas anticiper, c'est avoir la crainte de devoir se projeter dans le futur....
Moralité, tout ne serait-il pas question d'angle de vue finalement ? ;-)
Ouh la ! Loin de moi l'idée de faire apparaître Mister comme étant autre chose qu'une perle! ;-)
RépondreSupprimerDisons qu'en lisant le message, j'avais l'impression que Mary Poppins se retrouvait un peu seule sur ce coup-là (penser à aller acheter les couches, l'appel pour le RV chez le pédiatre, noter le coup de la marraine, les courses pour le jambon, etc...).
Mais si ce n'est pas la cas, alors effectivement, on peut plutôt se concentrer sur la différence d'angle de vue.
Pourquoi ai-je fait l'amalgame entre perfection et anticipation ? Parce qu'étant plutôt (beaucoup !) du bord de eillac, c'est-à-dire laxiste, doublée d'un manque de constance, et donc faisant les choses un peu comme elles viennent, forcemment il y a toujours quelque chose d'oublié, de laissé pour compte, ou de râté. Mais cela ne m'emeut pas plus que ça, puisque j'essaie de me concentrer sur l'essentiel, et que l'essentiel est devant moi, à cet instant précis (la grosse excuse d'une fénéante...).
Crainte de se voir projeter dans le futur ? Peut-être.
Différence d'angle de vue ? Peut-être.
Mais une certitude: pas envie de changer de bord pour l'instant !
Et toi, Mary, y-a-t'il une envie de changer ?
Amitiés,
Soph
Soph, je suppose que non puisque c'est grâce à l'anticipation que je dégage du temps pour écrire 6000 messages (trop longs, je te l'accorde) sur un forum, que je trouve l'énergie de lire tous les traités en matière d'allaitement, que je parviens à sortir souvent le soir, seule ou avec Mister, à partir en week-end seule et que je me fais plaisir avec des billets juridiques, "serais-je masochiste ?" ;-)))
RépondreSupprimerOui le mythe s'effondre Soph !! LOL
RépondreSupprimerPâté Patates
A part ça, François, je suis confuse et pourtant si heureuse d'avoir eu, pour lecteur, un homme aussi connu que toi, d'autant que j'ai à peine dû insister pour que tu fasses un saut ;-))) : donc, sois le bienvenu ici, au plaisir de te relire prochainement, toi ou ta femme ;-)
RépondreSupprimerdepuis quelques jours, je tourne et je retourne ton billet dans ma petite tête de blonde...
RépondreSupprimerc'est surprenant comme je me suis retrouvée. ... et parfois je repense à ma liberté d'antant.. brièvement car je n'étais finalement pas aussi heureuse que maintenant... avec mon petit soleil de bébé :-)
moi je crois que tu te poses bcp trop de questions à un moment donner faut peut être arrêter de tournicoter du ciboulon ;-) oh la vache je suis fatiguée là!
RépondreSupprimerbises katy
Khalamity
RépondreSupprimerPourquoi crois-tu que j'ai eu envie d'un deuxième ? Parce que le premier me rendait (et me rend) si heureuse, malgré le "stress" qu'il peut déclencher en moi...
katy, top moumoute je suis, top moumoute je resterai mais c'est vrai que je cause et écris trop ! Un stage dans un monastère me serait fort utile ;-)))