vendredi 7 mai 2010

Et après la vie ?

Je me souviens parfaitement avoir secoué la tête en regardant pour la première fois une publicité portant sur le "contrat obsèques", ne voyant pas pourquoi je me prendrais la tête à choisir un modèle de cercueil et une pierre tombale. J'étais alors âgée de seize ans environ et mes préoccupations concernaient davantage mon maquillage et mes nouvelles chaussures que les questions relatives à l'au-delà : forcément, lorsqu'on a vingt ans, on se croit immortel !

Au cours des années qui ont suivi, j'ai appris bien malgré moi que la Grande Faucheuse est implacable et qu'elle surgit sans crier gare, parfois beaucoup trop tôt.

Cela dit, aujourd'hui, malgré mes quarante ans, je ne suis toujours pas convaincue que le contrat obsèques soit la bonne "réponse". Bien sûr, si cet enterrement, quel qu'il soit, est déjà payé et n'entraîne aucun frais pour la famille, tant mieux : la loi a la fâcheuse tendance à bloquer - pour un certain temps et un temps certain - les comptes en banque d'un défunt et il faut bien l'admettre, un cercueil, même en version "promo", coûte cher.

Partant toutefois de l'idée que ce n'est pas celui qui part qui est à plaindre mais ceux qui restent, je me demande qui doit décider du déroulement de l'éventuelle cérémonie, qui doit se prononcer sur le sort de la dépouille.

Imaginons que je sois très croyante, peu importe la religion, et que mes enfants ne le soient pas du tout : je doute qu'ils trouvent du réconfort dans une oraison funèbre ponctuée de références à cette vie éternelle qui s'ouvre à moi, aux paraboles et aux rituels découlant de cette église.

Imaginons que je sois totalement athée et que par le biais d'un contrat obsèques, j'exprime ma volonté quant à mes cendres : elles doivent être éparpillées au-dessus d'une petite rivière dans les montagnes suisses, au son d'un morceau magnifique. Si mes enfants devaient être très pratiquants, ils déploreront certainement l'absence de lectures pour eux saintes, de gestes et de prières pour eux significatifs.

Ainsi, j'en viens parfois à me demander s'il n'est pas souhaitable que l'éventuelle cérémonie se déroule en fonction des attentes et des besoins de ceux qui restent, non de celui qui part : pourquoi attendre la mort d'une personne proche pour réfléchir à la question ? Les funérailles, mode d'emploi peut être un titre surprenant : n'empêche, on devrait savoir "comment ça marche" avant que Papa passe l'arme à gauche, avant que Maman ne mange les pissenlits par la racine ou que Mari passe de vie à trépas.

En même temps, la seule idée que ma dépouille puisse être bénie à grand renfort d'encens et ma vie conclue par des promesses de paradis par l'entremise d'un curé ergotant en latin glace mon sang d'athée... Au nom de quoi mes descendants ou Mister devraient-ils pouvoir entraver mon désir de faire don de mon corps, une fois devenu un morceau de viande froide, à une bande d'étudiants en médecine dont la vocation relève davantage des beaux yeux d'
Abby que du savoir-faire de Ducky ?

Dans l'absolu, il est certainement judicieux d'aborder ces questions avec son entourage lorsqu'on a encore bon pied, bon oeil mais essayez, vous le constaterez rapidement : elles mettent presque tout le monde mal à l'aise. Comme si parler de la mort portait malheur, comme si la seule évocation d'un fait inéluctable allait entraîner sa réalisation immédiate... Peut-être parce qu'en réalité, nous avons tous peur de la mort, de la nôtre, encore davantage de celle des gens qui nous sont si chers ?

Je n'ai pas trouvé de réelles réponses à ces questions qui taraudent parfois mon esprit : ce n'est d'ailleurs pas par hasard que ce blog ne s'appelle pas lesréponsesdemadamepoppins !

Accepteriez-vous de partager avec moi vos propres tribulations dans ce domaine ?

A bientôt si vous le voulez bien,

7 commentaires:

  1. Bonjour Mme Poppins,

    Ce thème n'est évidemment pas facile à aborder en famille ou avec ses amis. Regards qui se détournent, malaises dans la conversation,... On se dit que tant que ça ne nous concerne pas, pas la peine d'y peiner. Mais il a suffit qu'un proche soit frappé pour revoir la question. Tant de chose ont du être décidées rapidement car il n'y avait de contrat obsèques: la tombe, la messe (famille catholique oblige),... etc Personne n'étant d'accord sur les choix faits, le budget défini, les comptes sont gelés, tout doit être partagé,... Toutes ces tracasseries m'ont fait réfléchir car je n'ai pas aimé l'image qui est restée associée à ce triste évènement. Ainsi lors d'un déjeuner avec ma famille proche, j'ai "lâché" mes dernières volontés. Cela a eu m'effet d'une bombe :D mais finalement la discussion a eu lieu et le malaise s'est un peu dissipé.
    Mon choix: léguer les parties de mon corps qui peuvent être réutilisées et brûler le reste.
    Hérésie pour certains, je trouve cette solution moins contraignante pour ceux qui reste, ne trouvez-vous pas?

    Bonne soirée

    PS: j'ADORE la série NCIS. Si je devais être autopsié, je veux que ce soit fait par Ducky et Abby!!! :D

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  2. oups pardon pour les fautes d'orthographe -_-"

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  3. Je travaille depuis quelque temps pour un fondation qui propose des accompagnements aux personnes en deuil. Du coup, je constate autour de moi, que ceux qui restent sont évidemment ceux qui ont le plus besoin d'attention, mais que ce besoin est la plupart du temps consécutif de la rupture du lien qu'elles ou ils avaient avec la personne partie...

    Et donc, mais là je bascule vers le personnel, il me semble important d'au moins savoir ce que cette personne partie "voulait". Non pas pour elle, mais pour moi et les autres qui restent. Si on sait au moins quoi faire, ça évite de partir dans tout les sens et impose un forme de rituel sur ces trois jours féroces que sont ceux du deuil "officiel".

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  4. Mes parents avaient fait leurs préarrangements avant leur décès et ça facilite beaucoup les choses, mais ce n'est pas un sujet plaisant à aborder. Merci pour ta visite sur mon blogue, tu dis des choses intéressantes, je reviendrai.

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  5. Chère Mary,
    En avançant en âge, on se rend compte de la vanité des volontés de ce type, qui ne servent qu'à faire vivre plein de rapaces sans empathie aucune pour les défunts.
    Étant mécréant, je me moque de ce qu'il adviendra de mon corps plus tard. Par contre, n'aimant pas les gaspillages, il me déplairait que mes héritiers dilapident mes biens en cérémonies, messes et cercueils dans le but d'épater le voisinage.
    J'ai ainsi pu apprécier les "regrets" de gens qui poussent l'hypocrisie jusqu'à mettre une demi-douzaine de cartes de visite à l'entrée de l'église, pour pallier à ceux qui n'ont même pas trouvé la mort comme motif à déplacement!
    Chez nous, en Belgique, on est plus pragmatique. Par exemple, sans demande expresse à la mairie, on est censé être donneur "volontaire" de ses organes. Les familles peuvent, malheureusement, s'opposer à cette volonté, mais c'est à elles à faire la pesée du pour et du contre pour la mort éventuelle d'un enfant en contre partie de simagrées d'étiquette ou de fausse dévotion.
    Il n'est qu'à voir les familles après les enterrements: certains membres acquièrent rapidement une belle teinte rouge brique, témoin de leur alcoolisation.
    Il faudrait imposer des "Alcootests" après l'ultime "au revoir"! ;)
    Amitiés

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  6. Emilia, je vous admire : vous avez osé lancer le sujet et ne pas vous laisser intimider par la gêne qu'il a dans un premier temps occasionné chez vos proches. Bravo ! Et oui, sur le principe, je vous rejoins : c'est plus facile pour ceux qui restent mais que faire si ces volontés blessent les gens qui restent, si ces désirs sont trop difficiles pour ceux qui restent ?

    Mirou, c'est en effet tellement plus important de pouvoir vivre son deuil plutôt que de s'étriper ou de s'interroger sans fin sur le "que faire", "que décider", "qu'aurait-il / elle voulu ?", la remarque est judicieuse et fort sage.

    Solange, à mon tour de te remercier d'être venue jusqu'ici : je déduis de ton commentaire que tu étais en accord avec les arrangements pris par tes parents. Aurais-tu pu les respecter aussi facilement si tu avais été en complet désaccord ?

    Armand, je serais pour ma part aussi favorable à ce que le don d'organes soit le système valant "par défaut", ie le prélèvement est possible tant que le défunt n'a pas, de son vivant bien entendu, précisé qu'il ne souhaitait pas une telle chose. En même temps, je peux aussi comprendre qu'une telle décision n'est pas forcément facile à accepter pour ceux qui restent. Quant au taux d'alcool de certains après un enterrement, je me suis longtemps offusquée de ce fait; actuellement, je suis assez "pragmatique" : il n'est parfois que le reflet du fait qu'après des émotions très fortes, violentes et douloureuses, les gens noient leur chagrin et recherchent dans l'ivresse un peu d'oubli. C'est évidemment un peu résumé, comme façon de dire les choses mais maintenant, je pense que la fameuse "verrée" après un enterrement est une chose importante : elle peut être l'occasion d'échanger des souvenirs au sujet du défunt, l'occasion de parler plus longuement avec quelqu'un : difficile de parler dans l'ambiance étriquée d'une église.

    Merci pour vos commentaires, merci d'avoir livré un petit bout de vos réflexions à ce sujet.

    A bientôt si vous le voulez bien,

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  7. Depuis que j'ai 14 ans je dis haut et fort qu'une fois morte je veux être incinérée, que je suis pour le don de mes organes et que je refuse toute cérémonie religieuse.

    J'ai longtemps cru que je mourrais de toute façon avant mes trente ans. En ayant bientôt 37..j'accepte depuis trois ans seulement l'idée que j'ai un avenir possible. Donc toutes les projections/projets qui vont avec.

    Mon testament est fait, mon ami connait ma volonté et la respectera, de même que je connais les siennes.

    J'ai pour ma part toujours considéré que la mort est trop présente dans la vie pour l'ignorer. Mais disons que c'est un sujet peu facile à aborder avec tout un chacun sans déclencher un charivari de tout les diables :) Comme si parler de la mort pouvait provoquer son entrée en jeu...

    Peut-être aussi le fait que l'avoir croisée plusieurs fois permet-il au fond de la considérer comme un personnage de plus de la comédie de la vie. Ni plus, ni moins important qu'un autre.

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