mardi 14 mars 2017

Des visages d'abord anonymes

La station service, en bas de chez moi, est un lieu fort pratique lorsque, en bonne mère qui bosse trop, j'ai oublié un article (souvent le pain) mais que les magasins, aux horaires helvétiques, sont déjà fermés. 

J'ai d'abord eu recours à ces arrêts par nécessité, depuis quelques temps par plaisir aussi, même si mes achats y sont restreints, la majoration de prix y étant pharaonique. 

En effet, durant le week-end en particulier, elle est très régulièrement tenue par T. ou par M. 

Vu leur âge, j'ai admis qu'ils étaient étudiants, ce qui s'est avéré exact. L'un termine son bachelor en psychologie à l'université, l'autre est en soins infirmiers en HES

De "fil en aiguille" (comprenez de "plein de diesel en baguettes de pain"), ils m'ont raconté des bribes de leur vie, de leurs passions, de leurs difficultés personnelles également : je sais notamment quand ils ont des examens, quand ils ont réussi, quels sont leurs projets d'avenir, à quelles turpitudes familiales ils doivent faire face, quels sont leurs "rêves". 

Et j'aime bien ces échanges, parfois très courts "alors, ces examens, c'est pour bientôt ?" ou ces discussions plus nourries parce que le magasin est désert : j'aimerais que les "vieux cons" qui critiquent les jeunes "sans ambition, profiteurs, grossiers et obsédés par le virtuel" puissent les rencontrer, T. et M. ! 

Ils sont en effet toujours souriants, toujours aimables, toujours serviables et rapides dans l'exécution des tâches confiées : l'anti-thèse des clichés négatifs.

Ce que j'ai découvert récemment, alors qu'à ce jour, c'était surtout d'eux dont il était question lors de mes passages - ils savent que j'habite le quartier derrière la station, que je suis professeure de droit et que j'ai des enfants - T. m'a "soufflée". 

Venue acheter un paquet de cigarettes avant une soirée qui s'est avérée mémorable, j'ai ouvert de grands yeux lorsque, après son rituel grand sourire "tiens, bonsoir, comment allez-vous ?", il m'a demandé tout de go "vous vous êtes fait une coloration des cheveux ? Ca vous va vraiment très bien !"

Je n'avais jamais envisagé que T. puisse avoir remarqué ma couleur de cheveux, encore moins son changement, léger, notamment parce que cette fameuse coloration, je l'avais faite une semaine auparavant et que personne, que dis-je, PERSONNE ne l'avait notée, même pas mes enfants ou mes proches !

Ainsi, T., merci pour votre regard et votre gentil compliment !

D'anonymes, T. et M. sont devenus des visages que j'apprécie de croiser et dont la présence a quelque chose de rassurant dans le stress quotidien.

Vous, à qui vous êtes-vous "attaché-e-s" dans la foule qui vous entoure ?

A bientôt si vous le voulez bien,


4 commentaires:

  1. Entre le monde médical qui a été mon quotidien, et les milieux musicaux, j'ai constitué, non ! nous avons constitué des relations sincères, étonnantes… tu sais Madame Poppins, ces relations qui créent un "lien".
    Et puis via le web, des liens, se créent… aussi

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  2. Il est des liens qui sont improbables mais qui n'en sont pas moins merveilleux !

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  3. Avec notre compagnie de théâtre (www.2bcompany.ch), nous avons la chance depuis quelque temps de tourner un très joli spectacle ("Conférence de choses"), qui se joue par "épisodes". C'est-à-dire que le spectacle peut durer jusqu'à 8 heures non-stop, mais qu'en général, nous jouons des "épisodes" d'environ une heure, chaque soir (donc plusieurs soirs de suite, chaque soir une heure).
    Dans toutes les villes où nous avons tenté cette expérience, des communautés de spectateurs se sont créés: des gens, qui ne se connaissent ni en noir ni en blanc, et que nous ne connaissions ni en noir ni en blanc, et qui sont venus voir (presque) tous les épisodes. Des anonymes qu'il était fort agréable de croiser chaque soir, mais aussi, la journée, en ville....

    (D'ailleurs nous jouons la 101e représentation de Conférence de choses demain (jeudi 16) à l'Usine à Gaz de Nyon, à 19h30. Si un lecteur de ces tribulations passe par là, faites-moi signe ! )

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