Partant de l'hypothèse (plus que plausible) que mes lecteurs juristes / avocats ne se comptent même pas sur les doigts d'une main et que mes "envolées juridiques" présentent un intérêt surtout pour moi, mon autre moi, mon alter ego et mon sur-moi, j'ai décidé de consacrer une série de billets, intitulée "brève de bureau", à une disposition légale en rapport direct avec la "vie de tous les jours au bureau", que ce "bureau" soit celui d'un comptable, d'une chimiste ou encore d'une secrétaire.
Ainsi, j'aborderai en particulier différentes questions en rapport avec le licenciement, la réglementation protégeant la femme enceinte, le travail du week-end, le certificat de travail ou encore le travail et les heures supplémentaires, autant de sujets qui découlent de ma pratique quotidienne.
Et pour "inaugurer" ces brèves, j'ai choisi un sujet "typiquement féminin" : l'allaitement. Esprits lubriques, passez votre chemin, je ne vais pas vous entretenir de seins mais des saintes dispositions supposées permettre à toute femme de poursuivre un allaitement serein et "en conformité" avec les recommandations de l'OMS à la fin de son congé-maternité.
Le législateur suisse annonce son intention d'accorder une protection particulière aux femmes enceintes et allaitantes à l'art. 35 de la loi sur le travail (LTr), qui prévoit en particulier à l'alinéa premier que l’employeur doit occuper les femmes enceintes et les mères qui allaitent de telle sorte que leur santé et la santé de l’enfant ne soient pas compromises et aménager leurs conditions de travail en conséquence.
Cette déclaration est précisée par l'article 60 al. 2 OLT1, selon lequel au cours de la première année de la vie de l’enfant:
a. l’intégralité du temps consacré à l’allaitement est réputée temps de travail lorsque la travailleuse allaite son enfant dans l’entreprise;
b. la moitié du temps consacré à l’allaitement est réputée temps de travail lorsque la travailleuse quitte son lieu de travail pour allaiter;
c. aucun rattrapage, ni antérieur, ni ultérieur, n’est dû pour la seconde moitié du temps consacré à l’allaitement, qui n’est pas non plus imputée sur d’autres périodes de repos ou de repos compensatoire légales.
Mon expérience professionnelle, même si restreinte en la matière, me permet d'affirmer qu'il est sans grand intérêt de commenter longuement l'art. 60 al. 2 lit b et c OLT1 : à l'heure actuelle, plus aucune femme n'est en mesure de retrouver son enfant pour l'allaiter, ceci pour différentes raisons pratiques tenant notamment aux réglements des crèches ou à la durée du trajet entre le lieu de travail et le lieu de résidence de l'enfant.
En revanche, je pense qu'il est important de préciser un peu l'art. 60 al. 2 lit a OLT1. En effet, si l'on voit mal une mère retrouver son enfant pour l'allaiter, on voit encore plus mal un enfant être amené sur le lieu de travail. Par conséquent, il est primordial de lire cette disposition à la lumière du "progrès" : j'ai nommé cet engin romantique qu'est le tire-lait.
A mon avis, son utilisation doit clairement être assimilée à un allaitement "dans l'entreprise". Ceci notamment parce que la femme se trouve effectivement sur son lieu de travail et qu'elle reste à la disposition de l'employeur, le sein et le tire-lait pouvant être rangés rapidement en cas de nécessité. Finalement parce qu'une séance "d'extraction" dure généralement moins longtemps qu'une réelle tétée, ce qui constitue un avantage indéniable pour l'employeur.
J'attire encore l'attention sur le fait que le droit suisse accorde cette protection à la femme allaitante au cours de la première année de la vie de l'enfant, même si certains employeurs peu empathiques affirment que la reprise de l'activité professionnelle après le congé-maternité met fin à toute forme de "privilège".
Ainsi, femmes d'Helvétie, ne culpabilisez plus lorsque vous enclencherez votre tire-lait, électrique si vous êtes adeptes de l'efficacité, manuel si vous avez hérité de celui de votre grand-mère : il est légalement prévu que ce temps soit considéré comme "de travail".
Toute femme qui a utilisé un tel engin sait que c'est en effet une forme de "boulot" de s'astreindre à cet exercice, surtout lorsque, comme moi, c'est assise sur les toilettes, mon bureau de l'époque ne fermant pas à clé, qu'on utilise cette "pompe"...
A bientôt si vous le voulez bien,
Avouons que ce tire-lait ressemble davantage à un objet futuriste des années soixante qu'à l'objet qu'il est vraiment. Philippe Starck n'a surement pas été consulté.
RépondreSupprimerÀ propos, chez vous, on dit "Chère Confrère" ou "Chère Consoeur"?
En plein d'dans ;-)) Le tire-lait dans les toilettes du bureau/hotel/etj'enpasse, je connais, et il y aurait beaucoup à dire... grrr...
RépondreSupprimerPetite anectode:
En Espagne, au retour du congès maternité (16 semaines), on a droit à une heure par jour pour l'allaitement jusqu'aux 9 mois du bébé. Or, une loi est passé récemment permettant de choisir entre l'heure d'allaitement journalière, ou le cumul des heures, et donc l'allongement d'un mois du congès maternité. J'ai hésité, puis j'ai préféré ne pas cumuler afin de pouvoir avoir des journées "moins chargées".
Quelle ne fut pas ma surprise, lorsque de retour, j'apprends qu'en effet c'est une heure, mais que si l'on sort et que l'on revient travailler, donc une heure au milieu de la journée. Si l'on désire accourter sa journée de travail et donc prendre "l'heure" à la fin de la journée, ce n'est plus qu'une demie-heure qui peut être décomptée...
Par contre, le cumul est bien compté sur 1 heure par jour, et jamais sur une demie-heure.
Pas très juste, non ?
Bises,
Soph
Et, Omo-Erectus, il manque une chose importante à l'image du tire-lait que vous évoquez : le bruit que fait le modèle électrique.... tout un poème !
RépondreSupprimerEt on dit "cher Confrère" à une femme quand on est un homme et "chère Consoeur" quand on est une femme à une femme. En principe. Parce que dans la "vraie" vie, les hommes disent aussi "chère Consoeur" aux femmes.
Ainsi, cher Confrère, revenez souvent me voir : merci pour votre visite, elle a été un véritable honneur.
PS: me dites pas que vous vous intéressez au droit suisse ? à l'allaitement ? aux seins, ça, je savais ;-)
Soph, là, franchement, comme truc pas logique, j'ai rarement entendu pire ! Y a pas moyen de s'assurer que c'est bien ainsi ? Parce que moi, dans certains cas, j'aurais tendance à me méfier des propos de l'employeur ! A se demander si le cumul et le mois supplémentaire n'aurait pas été plus avantageux, non ? J'espère en tout cas que tu tiens le choc avec cet outil de malheur et que la reprise s'est bien passée. Bises,
Reste à espérer que le tire-lait devienne un objet fashion (coloré, designé, fascinant, tant par sa forme que par son fond) pour pouvoir l'arborer en pleine réunion et que le boss s'extasie de ce gain de temps tout professionnel et de cette pause toute esthétique en enviant les femmes et en en commandant dare-dare chez " Tire-lait SA,les plus chouettes tire-lait du monde vous n'en reviendrez pas,garanti ou pas remboursé faut pas déconner) mais ça il le gardera bien secret (parce qu'il n'a pas de lait) !
RépondreSupprimerSchizozote,
RépondreSupprimerEt s'il utilisait le tire-lait comme cible de tir ? ;-)
Ah je suis désolé, vraiment.
RépondreSupprimerJe comprends bien le problème posé dans votre billet mais je n’ai pas pu me retenir d’un rire retentissant au moment du « surtout lorsque, comme moi, c'est assise sur les toilettes, mon bureau de l'époque ne fermant pas à clé, qu'on utilise cette "pompe"... ».
En plus je ne vois pas pourquoi je pose un commentaire, visiblement, ça ne me concerne pas…
Edgar
Non, vraiment, désolé … hum…
Vous voyez, Edgar, j'espérais (aussi) faire rire : comme quoi, le droit n'est pas toujours si "aride"... ;-)))
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